Lettre ouverte à mes amis de Facebook
Dans le milieu que je fréquente
(et que j’aime), il est de bon ton de dénigrer Facebook, multinationale
américaine s’il en est et surtout, grand espion de nos émois quotidiens comme
de nos indignations. Laissez-moi une fois de plus ne pas hurler avec les
loups : j’ai pu, au fil du temps, apprécier tant de bénéfices secondaires
à cet outil, que je ne vois pas pourquoi je devrai m’en passer.
Alors, c’est vrai, FB est chronophage : on se jure – dans son for intérieur – que l’on va y consacrer 10 minutes, nous voilà parti pour une bonne heure (et encore les jours de petite forme !). C’est certain, il va falloir que l’on apprenne à s’autodiscipliner avec davantage d’efficacité…
Alors, c’est vrai, FB est chronophage : on se jure – dans son for intérieur – que l’on va y consacrer 10 minutes, nous voilà parti pour une bonne heure (et encore les jours de petite forme !). C’est certain, il va falloir que l’on apprenne à s’autodiscipliner avec davantage d’efficacité…
Mais c’est peu de choses si je
regarde en premier lieu l’effet positif qu’ont vos partages sur mon humeur. Vos
interventions sont capables de m’émouvoir, de me mettre en colère, de me
réjouir, de me faire pleurer, de m’indigner, de me bousculer. Je n’ai jamais lu
tant d'articles de tous ordres que depuis que cet outil existe. Renforcement de mes
convictions ? Pas seulement ! J’ai la chance d’avoir des amis de tous
bords, avec un dénominateur commun : l’intelligence. Ils ne crachent pas
leurs opinions, ils les expriment, les documentent, les expliquent. J’ai appris
tant de choses ces derniers mois, que ce soit sur le revenu universel de base,
la protection des animaux – merci Victoire ! -, le monde musulman – merci
Nadia ! -, que j’ai parfois l’impression de voir tomber mes croyances une à une et
de me reprogrammer avec régularité. Sans parler de nos anniversaires !
Moi, j’adore que des tas de gens me le fêtent, avec un mot doux, un petit cœur.
Je sais, ça ne mange pas de pain, mais c’est doux à mon oreille, et je sais que
pendant quelques secondes, j’étais présente dans leur vie et dans leur cœur.
Vous vous souvenez des anniversaires avant FB ? Déjà on se fâchait avec
son amoureux qui oubliait une fois sur deux. Alors que là, avec les alarmes de
tous nos gadgets, c’est simple, je croule sous les messages (et j’adore). Oui,
mon ego est content. Une fois par an, on peut le laisser se pâmer, non ?
C’est clair, jusqu’à maintenant, je
n’ai jamais eu un coup de mou dont FB ne soit venu à bout. Si, si, je vous
jure… Si parfois je me sens seule, quand je pars m’isoler à la campagne pour
écrire par exemple, je me connecte à son flux, et je retrouve le sourire. Celui de voir vos
belles énergies ici réunies, les mots de tendresse de mes semeuses chéries, de
mes amis d’autrefois et de ceux d’aujourd’hui. En effet, qui n’a pas retrouvé
un vieux pote grâce aux réseaux sociaux ? Moi qui avais coutume de penser
que si la vie nous avait séparés, c’est que c’était notre destin, je m’amuse
ces derniers temps à remonter le temps. Et finalement, passé le choc de prendre
conscience que « Ah oui, c’était il y a trente ans », j’ai
l’impression que l’on reprend nos conversations là où on les avait laissées.
Impressionnant ! Ce n’est clairement pas toujours simple, oh non parce
que j’aurai trop changé (ni eux non plus), mais parce que cela génère des
embouteillages dans mon emploi du temps. Car, si les réseaux sociaux sont
virtuels, je n'ai de cesse de les faire passer dans le réel. Et on y
parvient. Sans parler des projets professionnels qui voient le jour parce que
l’on a appris par FB que l’un ou l’autre avait vécu telle expérience - merci Pascale ! -, ou
s’était formé à telle pratique. Ni de ces amis pas assez proches pour faire partie du premier cercle, mais si forts dans nos cœurs pourtant et que l'on suit au fil du temps. C’est si bon ! Et même lors des
attentats : s’il était important de savoir se déconnecter (après) pour sortir de
la sidération face à de tels évènements, dans un premier temps, nous avons pu
nous sentir ensemble, connecté (au sens premier du terme), et savoir qui était
en sécurité. Perso, cela m’a aidé. Un peu, et c’est déjà bien.
Sans parler de la puissance
commerciale - pourquoi nier que c'est bien pratique pour faire connaître ce que l'on fait -, mais surtout citoyenne des réseaux sociaux. C’est certain, nos pétitions ne sont pas
suffisantes pour faire changer le monde, mais elles ont un réel pouvoir de
pression et nous avons pu l’expérimenter avec efficacité plusieurs fois ces
derniers temps. A nous ensuite de transformer l’essai, et de passer de
l’indignation à l’action. Moi, je trouve qu’on s’en sort bien. Et que si FB
nous espionne, nous profitons pas mal de la situation. Sous les yeux de ceux
qui se croient puissants et qui ne voient pas leur monde changer (alors qu'ils n'auraient qu'à y prêter attention pour en prendre conscience). Je ne suis pas naïve, mais j’ai quand même
l’impression que l’on rattrape à la vitesse de l’éclair une partie des cours
d’éducation civique de notre enfance : sans FB, je n’aurai jamais vu
« La stratégie du choc » de Naomie Klein – Merci Isa ! -, ni
« J’ai pas voté ». Sans FB, à ce jour, je ne serai pas Irakienne, ni
Pakistanaise, et toujours Paris, Bruxelles, Berlin et Charlie. Le cœur ouvert,
le doute à l'esprit.
Je veux bien boycotter des tas de
marques, de Coca-Cola, à Starbuck et McDonald's (zéro effort pour moi, c’est
vrai, ils sont absents de ma vie depuis des décennies), Ikéa et Amazon (ce qui
est déjà plus compliqué, mais faisable), mais s‘il vous plaît, laissez-moi Facebook…
Et laissez-moi remercier du fond du cœur
ce millier d’ « amis » - dont certains, je le reconnais, sont de parfaits inconnus pour moi, mais s'appuient sur cet adage qui me plaît, selon lequel les amis de mes amis sont mes amis, si, si - qui représentent néanmoins des tas de
facettes de qui je suis et qui ont en tous cas la force de conviction
d’ensoleiller souvent et même parfois de transformer ma vie.
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